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Titres-restaurant : prolongation de leur usage élargi jusqu’en 2026, quel impact pour les commerçants et consommateurs ?

Par Lucie Simoneau -  
Le 11/02/25

Une prolongation attendue par les ménages et les commerçants

Les députés français ont récemment voté la prolongation de l’utilisation des titres-restaurant dans les supermarchés jusqu’au 31 décembre 2026. Cette mesure, adoptée en 2022 pour aider les ménages à faire face à la hausse des prix alimentaires, permet aux salariés de régler leurs courses avec leurs titres-restaurant, y compris pour des produits non directement consommables sur place, comme le riz, la viande ou les conserves.

📊 Chiffres-clés sur l’usage des titres-restaurant (Source : Bercy – 2024) :

  • 4,8 millions de salariés bénéficient des titres-restaurant en France.
  • Environ 8 milliards d’euros de transactions annuelles via ce dispositif.
  • 40 % des paiements en titres-restaurant ont lieu en supermarché (contre 20 % en 2021).
  • 60 % des utilisateurs estiment que la réforme leur a permis d’améliorer leur pouvoir d’achat.

Témoignage :
« Avant, je gardais mes titres pour déjeuner au restaurant. Aujourd’hui, je m’en sers surtout pour acheter des produits frais, notamment des légumes, du pain et du fromage, qui sont devenus très chers », explique Anne C., employée dans une PME à Lille.


Un dispositif détourné de son objectif initial ?

Les titres-restaurant ont été créés en 1967 pour aider les salariés à accéder à un repas équilibré lorsqu’ils ne disposent pas de cantine d’entreprise. En les rendant utilisables pour l’ensemble des courses alimentaires, la réforme actuelle les transforme en un chèque alimentaire informel, ce qui suscite de nombreuses réactions.

🗣 Réactions et analyses
🔹 Syndicats et associations de consommateurs : « Cette mesure soulage les salariés, notamment ceux aux revenus modestes qui peinent à faire leurs courses. Dans un contexte d’inflation alimentaire de +10 % en 2023, elle était indispensable. » (CGT Consommation)
🔹 Organisations patronales : « Le risque est que les employeurs rechignent à distribuer des titres-restaurant si ceux-ci ne sont plus dédiés à la restauration. » (MEDEF)
🔹 Restauration : « On détourne totalement le but du dispositif ! Il fallait plutôt créer un chèque alimentaire distinct. » (Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie – UMIH)

📉 Impact économique pour la restauration :

  • 30 % des restaurateurs ont constaté une baisse d’utilisation des titres-restaurant.
  • 15 % des établissements ont vu une diminution de leur chiffre d’affaires du midi.

Témoignage d’un restaurateur :
« Nos clients viennent moins souvent car ils préfèrent utiliser leurs titres-restaurant en supermarché. Résultat : on vend moins de formules déjeuner et cela met en difficulté de nombreux petits établissements. »François B., propriétaire d’un bistrot à Lyon.


L’impact sur les différents commerces

🏬 Les grandes surfaces : les grandes gagnantes

Depuis l’élargissement de l’usage des titres-restaurant, les supermarchés ont vu une augmentation significative des paiements en titres.

📊 Évolution des paiements en supermarché (Source : FCD – 2024) :

  • 2021 : 20 % des transactions en titres-restaurant
  • 2023 : 40 %
  • 2024 (prévisions) : 50 %

Témoignage d’un directeur de supermarché :
« Nos clients utilisent en priorité leurs titres-restaurant sur les produits frais et les plats préparés. Les rayons concernés enregistrent une hausse des ventes de +15 %. »Jean-Marc T., directeur d’un Intermarché à Bordeaux.

🍽 Les restaurateurs en difficulté

La Fédération des Restaurateurs Indépendants a récemment alerté le gouvernement sur les conséquences de cette réforme.

📉 Perte estimée pour la restauration :

  • Baisse de 15 à 20 % des transactions en titres-restaurant dans les établissements traditionnels.
  • 25 % des restaurateurs envisagent de revoir leur offre pour s’adapter à la nouvelle donne.

🛒 Les commerces de proximité en adaptation

Les boulangeries, traiteurs et épiceries de quartier cherchent à s’adapter en proposant davantage de produits éligibles aux titres-restaurant.

Témoignage d’un boulanger :
« Avant, on vendait surtout des viennoiseries et des sandwichs avec les titres-restaurant. Aujourd’hui, nos clients achètent aussi des plats préparés et des quiches, ce qui nous oblige à élargir notre gamme. »Éric L., artisan boulanger à Nantes.


Vers une réforme plus encadrée ?

Face aux critiques, le gouvernement envisage plusieurs pistes de réforme :

Limiter l’usage des titres-restaurant à certains produits : restreindre leur utilisation aux aliments destinés à être consommés immédiatement.
Dématérialisation totale des titres-restaurant pour éviter les fraudes et simplifier leur gestion.
Création d’un chèque alimentaire distinct pour les ménages modestes, destiné uniquement aux produits de première nécessité.

Analyse d’un économiste :
« La question aujourd’hui est de savoir si les titres-restaurant doivent rester un outil de restauration ou devenir une aide alimentaire. Une fusion avec un véritable chèque alimentaire pourrait être une solution plus équitable. »Claire Pinaud, spécialiste de la consommation alimentaire.


Quel avenir pour les titres-restaurant ?

La prolongation jusqu’en 2026 apporte un répit aux consommateurs, mais accentue les tensions entre supermarchés, restaurateurs et commerces de proximité. Si elle a permis un meilleur accès aux produits alimentaires en période d’inflation, elle a également détourné le dispositif de son objectif initial.

📌 Enjeux pour les prochaines années :

  • 🔸 Trouver un équilibre entre soutien au pouvoir d’achat et maintien de l’objectif initial des titres-restaurant.
  • 🔸 Préserver la restauration traditionnelle, un secteur déjà fragilisé par le télétravail et l’inflation.
  • 🔸 Encadrer l’usage des titres-restaurant pour éviter qu’ils ne deviennent un substitut inefficace à un chèque alimentaire.

Le débat reste ouvert et le gouvernement devra prendre des décisions cruciales dans les mois à venir. En attendant, commerçants et restaurateurs cherchent à s’adapter pour tirer le meilleur parti de cette nouvelle réalité économique.