Pour favoriser leur départ à la retraite dans de bonnes conditions économiques, les commerçants exploitant un fonds de commerce ont intérêt à anticiper la recherche d’un repreneur. Sinon, ils peuvent résilier, mais moins avantageusement, le bail à tout moment.
Ces prérogatives particulières, inapplicables aux dirigeants de SA et SAS, bénéficient aux commerçants personnes physiques, à l’associé unique en EURL, à l’associé majoritaire de SARL depuis au moins deux ans et aux personnes admises au bénéfice d’une pension d’invalidité attribuée dans le cadre du régime social. La Loi Pinel du 18 juin 2014 les a étendues à leurs héritiers.
Si le fonds de commerce est attractif ou si les locaux se situent dans un lieu valorisé, le locataire trouvera économiquement avantage à transformer son patrimoine commercial en liquidité valant épargne au départ en retraite pour exercer une autre activité (« cession-déspécialisation », art. L. 145-51 Code de commerce) : il cède, au choix, son droit au bail avec l’accord du bailleur – non requis le plus souvent – ou son fonds de commerce à la cession duquel le bailleur ne peut s’opposer.
Le bailleur peut-il demander en contrepartie, au nouveau locataire, indemnité ou révision du loyer ? A cette question laissée ouverte par le législateur, une réponse ministérielle de 1991 a indiqué que le bailleur pouvait percevoir une indemnité correspondant à son préjudice démontré ou bien demander révision du loyer dans les 2 mois de la signification.
Dans tous les cas, selon la jurisprudence, si la déspécialisation n’ouvre pas droit à une modification du loyer, l’acceptation des nouvelles activités par le bailleur peut motiver valablement déplafonnement lors du renouvellement du bail.
Si le locataire n’a pas anticipé sa stratégie de cession, il peut résilier le bail à tout moment, sans attendre l’expiration d’une période triennale, en formalisant son congé.
Cette faculté, qui joue essentiellement dans l’intérêt du locataire, fait courir au bailleur le risque de voir son local inoccupé entre le départ en retraite du locataire et le terme prévu dans le contrat. Un risque que le bailleur ne perdra pas de vue s’il se voit sollicité par un commerçant d’un âge proche de celui de la retraite. De son côté, le locataire gardera aussi en tête le risque de devoir continuer à payer le loyer, même après son départ en retraite, s’il ne respecte pas le formalisme requis pour donner son congé-retraite. Aussi, et dès la négociation engagée en vue de conclure le contrat de bail commercial, il importe pour les deux parties d’anticiper toutes les conséquences de ce droit dérogatoire au profit du locataire.
Le droit au congé-retraite prévu par l’article L.145-4 du Code de commerce est soumis à un certain formalisme pour être exercé valablement dès lors qu’il déroge au principe obligeant le locataire à attendre la fin de la période triennale pour demande de résiliation anticipée. Pour permette au bailleur d’organiser efficacement la reprise, le locataire doit respecter un préavis ne pouvant être inférieur à 6 mois avant la date de départ initialement prévue au contrat en fin de trimestre civil. Conséquence : le locataire n’est donc plus tenu par les échéances triennales du bail et peut donner congé à tout moment.
Le locataire ne quittant pas les lieux au terme du préavis s’expose à être considéré comme ayant renoncé à son congé. Le locataire donnant congé renonce à toute indemnité d’éviction et à tout droit ; les aménagements réalisés deviennent propriété du bailleur, sans indemnité le plus souvent.
Mis à jour par l'agence éditoriale Sub Verbo le 4 août 2017