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Loi anti-gaspillage : quelles obligations pour les commerçants ?

Par Lucie Simoneau -  
Le 07/10/24

En 2024, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC), adoptée en France en 2020, continue de transformer le paysage commercial. Cette législation vise à réduire les déchets, favoriser le réemploi et encourager la transition vers une économie plus durable. Les commerçants, en particulier ceux de la distribution et de l’alimentaire, sont au premier plan de cette transformation et doivent s’adapter aux nouvelles obligations légales. Mais quelles sont précisément les responsabilités des commerçants en vertu de cette loi et comment peuvent-ils s’y conformer efficacement ?

1. L’objectif de la loi anti-gaspillage

La loi AGEC a pour ambition de lutter contre toutes les formes de gaspillage, qu’il soit alimentaire ou lié aux produits non alimentaires invendus, tout en favorisant l’économie circulaire. Elle repose sur plusieurs grands principes :

  • Réduction des déchets à la source : Diminuer la production de déchets par une meilleure gestion des stocks et une réduction des produits à usage unique.
  • Réemploi et recyclage : Encourager le recyclage et le réemploi des matériaux, notamment à travers des dons et la réparation.
  • Responsabilité élargie des producteurs : Imposer aux entreprises la responsabilité de la gestion de la fin de vie de leurs produits.

 

Ces principes se traduisent par des obligations concrètes pour les commerçants, qui doivent revoir certaines pratiques pour se conformer à cette loi.

2. Les obligations spécifiques des commerçants alimentaires

Le secteur alimentaire est particulièrement visé par la loi anti-gaspillage, en raison du volume important de denrées perdues ou gaspillées chaque année. Voici les principales mesures qui concernent directement les commerçants de ce secteur :

a. Interdiction de détruire les invendus alimentaires

Depuis le 1er janvier 2022, les commerces alimentaires de plus de 400 m² n’ont plus le droit de détruire leurs invendus alimentaires encore consommables. Ils doivent les redistribuer, que ce soit à des associations caritatives ou sous forme de dons alimentaires, ou envisager la valorisation sous d’autres formes (alimentation animale, compost, méthanisation).

b. Obligation de proposer des alternatives au gaspillage

Les commerçants doivent mettre en place des mesures pour réduire le gaspillage, comme la vente de produits à prix réduits à l’approche de leur date limite de consommation (DLC). Les plateformes numériques proposant des paniers de produits invendus à moindre coût, telles que Too Good To Go, sont un exemple de solution que les commerçants peuvent adopter pour respecter cette obligation tout en attirant une nouvelle clientèle.

c. Partenariat avec des associations

Les commerçants peuvent conclure des conventions avec des associations pour faciliter les dons alimentaires. Ces conventions définissent les modalités de collecte, de transport et de distribution des denrées. La loi favorise également une meilleure gestion des stocks et la redistribution des invendus afin de limiter le gaspillage alimentaire.

d. Encourager la vente en vrac

Dans l’esprit de la loi AGEC, la vente en vrac doit être promue pour réduire les emballages et le gaspillage des produits. Les commerçants, en particulier les épiceries, doivent proposer une part croissante de produits vendus sans emballage, notamment pour les produits alimentaires.

3. Les obligations des commerçants non alimentaires

La loi anti-gaspillage ne concerne pas uniquement les commerces alimentaires. Les autres types de commerçants sont également soumis à des obligations pour réduire le gaspillage de produits non alimentaires, notamment dans les secteurs de l’habillement, des cosmétiques, des jouets et de l’électroménager.

a. Interdiction de détruire les invendus non alimentaires

Depuis 2022, les commerces ne peuvent plus détruire leurs produits non alimentaires invendus, qu’il s’agisse de vêtements, de produits d’hygiène, de meubles ou d’appareils électroniques. Ces produits doivent être donnés, recyclés ou réemployés. Les enseignes doivent donc s’organiser pour établir des partenariats avec des associations ou des structures de réemploi qui valorisent ces invendus.

b. Obligation de favoriser le recyclage

Les commerçants doivent mettre en place des systèmes de tri et de collecte pour faciliter le recyclage des produits en fin de vie. Par exemple, les magasins de bricolage ou d’électronique doivent proposer des points de collecte pour les équipements électriques et électroniques usagés afin de favoriser leur recyclage.

c. Information du consommateur sur l’éco-conception

La loi oblige également les commerçants à informer leurs clients sur la durabilité et la réparabilité des produits qu’ils vendent. Cela passe par l’étiquetage obligatoire de l’indice de réparabilité pour certains appareils électriques, et la promotion de la réparation comme une alternative à l’achat neuf.

4. Les sanctions en cas de non-respect

Le non-respect de ces obligations expose les commerçants à des sanctions financières et juridiques. Par exemple, le fait de détruire des produits alimentaires ou non alimentaires invendus au lieu de les donner ou les recycler peut entraîner des amendes allant jusqu’à 15 000 €. De plus, des contrôles renforcés par les autorités peuvent être mis en place pour s’assurer que les commerçants respectent bien leurs nouvelles obligations.

5. Comment les commerçants peuvent s’adapter ?

Pour se conformer à la loi anti-gaspillage, les commerçants doivent adopter des pratiques plus durables et organiser des partenariats adaptés. Voici quelques pistes pour faciliter cette transition :

a. Mettre en place une meilleure gestion des stocks

Pour éviter de se retrouver avec de nombreux invendus, les commerçants doivent améliorer leur gestion des stocks, notamment en :

  • Optimisant les commandes selon la demande réelle.
  • Anticipant les pics de ventes et les baisses de fréquentation.
  • Utilisant des outils numériques de gestion des stocks qui permettent de suivre les produits en temps réel et de prévenir les surstocks.

 

b. Nouer des partenariats avec des structures de réemploi

Que ce soit pour les invendus alimentaires ou non alimentaires, il est essentiel de collaborer avec des associations, des entreprises de recyclage ou des structures d’économie circulaire. Ces partenariats permettent de valoriser les invendus et d’éviter de payer des frais pour la gestion des déchets.

c. Sensibiliser les consommateurs

Les commerçants peuvent également s’appuyer sur la demande croissante des consommateurs pour des pratiques plus éthiques et durables. En valorisant leur engagement contre le gaspillage, ils peuvent attirer une clientèle plus soucieuse de l’environnement et se différencier de leurs concurrents. Proposer des produits en vrac, des solutions de réparation, ou des promotions sur les invendus sont autant de moyens de sensibiliser le public tout en réduisant le gaspillage.

d. Optimiser la collecte et le tri des déchets

Mettre en place des points de collecte visibles et accessibles dans les magasins pour les déchets recyclables, les équipements électroniques usagés ou les produits non alimentaires permet de répondre aux exigences légales tout en fidélisant les clients à travers des actions responsables.

6. Les avantages pour les commerçants

Bien que les nouvelles obligations puissent représenter un défi organisationnel, elles offrent également des opportunités pour les commerçants. En adoptant des pratiques plus durables, les commerçants peuvent :

  • Réduire leurs coûts de gestion des déchets : Moins de gaspillage, c’est moins de frais de traitement.
  • Attirer une nouvelle clientèle : Les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux démarches responsables, et valoriser ces initiatives peut être un atout marketing.
  • Renforcer leur image de marque : Être perçu comme un acteur engagé dans la lutte contre le gaspillage renforce la confiance des clients et fidélise une clientèle éco-responsable.

La loi anti-gaspillage impose de nouvelles obligations aux commerçants, mais elle s’inscrit aussi dans une tendance de fond vers plus de durabilité et de responsabilité environnementale. Pour répondre à ces exigences tout en tirant parti des opportunités qu’elles offrent, les commerçants doivent adapter leur organisation, optimiser la gestion de leurs stocks et de leurs déchets, et se tourner vers des pratiques plus responsables. En 2024, la lutte contre le gaspillage devient non seulement une obligation légale, mais aussi un levier pour transformer positivement son commerce et répondre aux attentes des consommateurs en matière d’éthique et de durabilité.